stand-by
with @Niven Leventis
tw :
médecine, bloc opératoire, fausse-couche, divorce, décès d’un enfant malade, angoisseTic, tac. Les minutes puis les heures passent. La journée n’a pas commencé du bon pied pour tout le monde. Des cauchemars, toute la nuit, à penser à lui, à suffoquer pendant ses réveils nocturnes et à pleurer, seule dans la pénombre de la nuit. La vie n’est pas tendre avec Ofelia depuis plusieurs mois et la trentenaire peine à réussir à se relever. Ce matin, elle avait la tête ailleurs, et ne pensait qu’à cela. Son mariage gâché, cet abandon brutal et sa confiance bafouée. L’estomac noué au plus haut point, la chirurgienne n’avait pas réussi à manger avant de partir travailler. Un simple café bien serré, et un léger bonjour à Niven. Ce matin, elle n’avait pas la tête à discuter et à se forcer. Elle savait bien qu’elle n’était pas obligée de se forcer avec lui, il acceptait ses silences et ses moments de bavardage. Mais quand bien même, Ofe n’avait fait aucun effort ce matin. Elle était partie, sans même un au-revoir, bien décidée à faire des heures supplémentaires et à se perdre dans les couloirs des blocs opératoires pour éviter de laisser du temps à son esprit pour penser et se torturer.
Des larmes qui n’avaient pas été que les siennes avaient coulé le long des joues à l’hôpital aujourd’hui. Ofelia avait dû faire face à ce qu’elle redoutait le plus dans son métier : la perte d’un patient. Deux fois aujourd’hui. Elle le savait, elle y était préparée depuis le début de ses études, mais la douleur était la même à chaque fois. C’était une routine pour elle, certes, mais rien n'efface sa peine face à la détresse des parents venant de perdre leur enfant. La journée avait continué avec son lot de surprises. Une rechute d’un patient, l’arrêt cardiaque sauvé in extremis d’un autre, puis une opération d’urgence qui l’avait forcé à passer plus de huit heures dans le froid du bloc opératoire D pour tenter de sauver la vie de son mini patient. Et Ofelia avait réussi, non sans mal. Sa journée n’avait pas été veine jusqu’au bout et lui avait souri malgré tout.
Le sourire avait été de courte durée, quand à la sortie de l’hôpital, elle l’avait aperçu au loin. James. Sans trop être sûre d’elle à 100%, la seule vision de celui qui l’avait aimé puis abandonné lui avait provoqué la nausée. Son estomac s’était retourné et elle s’était dépêchée de rejoindre sa voiture pour se camoufler et ne pas risquer une potentielle discussion. Son souffle s’était emballé et les larmes avaient à nouveau élu domicile le long de ses joues. Ce n’était pas juste. Aujourd’hui n’était vraiment pas sa journée. Et en plus, mercure n’était plus en rétrograde, alors elle ne pouvait même pas se rassurer avec ce phénomène de l’univers.
Les heures avaient été longues dans l'habitacle de sa voiture avant qu’Ofelia ne prenne le courage de prendre le chemin de la maison. Elle n’avait toujours pas mangé de la journée. Elle n’avait pas eu le temps, et de toute façon, elle n’en avait pas tellement envie. La chirurgienne avait hésité à passer récupérer un fast-food sur la route, mais finalement, elle était rentrée machinalement à la maison. Sa voiture garée, elle prit le temps de se regarder rapidement dans le rétroviseur central pour frotter une dernière fois ses yeux bouffis par les larmes. On ne sait jamais, Niven ne dormait peut-être pas. Et elle avait bien fait.
Ofelia sortit de sa voiture pour se diriger vers le palier où son colocataire fumait une cigarette. Il la salua, et elle se contenta d’un simple sourire comme guise de salutation. Il lui proposa des pancakes, et cette simple proposition suffit pour toucher Ofelia. Niven était gentil et attentionné.
“Si ça te fait plaisir… je n’ai pas encore mangé aujourd’hui, j’ai un peu faim.”
Ofelia avait ajouté un sourire sincère pour le remercier d’avance. Elle appréciait vraiment beaucoup Niven et leur cohabitation était sans doute la meilleure chose qui lui était arrivée depuis son divorce. Le trentenaire l’interrogea rapidement, et Ofelia haussa légèrement les épaules.
“Non. Enfin, j’ai opéré aujourd’hui, oui, comme d’habitude, mais j’ai mis un peu plus de temps à partir de l’hôpital.”
Elle soupira légèrement. Repenser à celui qu’elle avait cru voir la terrorisait encore. Elle était déstabilisée et ses yeux ne remplissaient déjà de larmes. Nouvel haussement d’épaule. Elle prit le temps de rentrer dans la maison, derrière Niven, avant de refermer la porte à clé derrière elle. Elle essuie ses yeux, souffle un bon coup, puis se tourne vers Niven.
“Excuse-moi. Ça a été ta journée ? Tu ne dors pas ?”
Elle lui sourit à nouveau, sincèrement. Changer de sujet, c’était sa technique ce soir pour éviter d’affronter ses angoisses. Ofelia se pencha afin de se déchausser, puis retira son manteau avant de s’approcher de Niven pour l’enlacer un instant.
“Désolé, j’ai même pas pris le temps de te dire bonjour.”
Elle resta une minute ou deux à l’enlacer, puis termine par se décaler. Son ventre gronde. Elle a faim. Finalement, les pancakes ne sont plus une option.